Avec une inflation durable et un marché de l’emploi tendu, les DRH sont désormais confrontés au risque d’incohérence de leur politique de rémunération et en particulier des grilles de salaires, à l’origine gage de reconnaissance équitable du travail et d’engagement des salariés. « Suis-je aussi bien payé que mon collègue de bureau ? » et « que gagnerais-je à prendre des responsabilités ? » sont des questions auxquelles l’entreprise doit être en mesure d’apporter des réponses satisfaisantes, grâce à ces matrices de rémunération que sont les grilles.
« Une grille de salaire équilibrée, disposant d’échelons en nombre suffisant, permet à chacun de se situer au sein de l’entreprise et de se projeter, explique Marc Grosser, partenaire du cabinet de conseil RH Topics. Sur cette base, l’entreprise peut aussi mieux repérer les inégalités et mieux négocier avec les partenaires sociaux. » L’outil définit des familles de métiers, des niveaux de qualification et de responsabilité, associés à une médiane de salaire, généralement établie en fonction d’un « benchmark », d’une norme sur le marché. Les plus petites entreprises se calent, elles, sur les minima décidés par leur branche professionnelle.
Mais la cohérence de ces grilles salariales est sapée depuis des mois par deux courants violents : d’une part la forte inflation – + 5,9 % en un an –, conduisant à des hausses successives du smic ; et d’autre part les salaires hors norme réservés à l’embauche des profils les plus recherchés sur un marché de l’emploi tendu. Les métiers pénuriques sont de plus en plus divers – de la tech et du numérique aux spécialistes de la logistique ou aux métiers de bouche.
« Une grille bis »
« Aujourd’hui, des spécialistes du digital peuvent obtenir 10 % à 15 % de plus que la moyenne des salariés, à qualification et expérience équivalentes, et plus encore si le recrutement est urgent, observe Cyrille Bellanger, directeur du conseil en rémunération de Mercer. Certaines entreprises ont dû établir une grille bis pour ces profils, voire pour les jeunes diplômés en général ; elles ont aussi intégré les primes, dont beaucoup sont quasi systématiquement accordées, dans le salaire de base pour l’améliorer. »
Franck Chéron, associé du cabinet Deloitte, constate lui aussi depuis deux ans une vaste réflexion sur les grilles de salaires des entreprises qu’il accompagne, certaines en recréent une, d’autres intègrent de nouvelles classifications ou élaborent une grille parallèle. « Une grille inadaptée conduit à la multiplication des cas d’exception », rappelle Claire Morel, directrice de Syndex, qui conseille les délégués syndicaux et les comités sociaux et économiques.
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