Publié le 19 juil. 2023 à 14:34
Volet 1 – Au sujet du POG
Parmi les nouveautés les plus marquantes ayant été introduites par DDA, figuraient en bonne place les dispositions relatives au dispositif dit de « gouvernance et de surveillance de produits » (product oversight & governance, « POG »). Ce mouvement, qui avait pu être qualifié de « mifidisation » du droit des assurances, impliquait une financiarisation des règles entourant la conception et la distribution des produits d’assurance vie et non-vie.
Pour mémoire, l’article 25 de la DDA prévoit s’agissant du POG, un processus destiné à s’assurer que les produits d’assurance répondent de façon effective et tout au long de leur cycle de vie, aux besoins des preneurs d’assurance, besoins déterminés selon un marché cible.
Le Code des assurances a ainsi transposé cette exigence au sein de son article L. 516-1 en renvoyant pour son application au Règlement Délégué 2017/2358 (le « Règlement »), lequel Règlement met à la charge des concepteurs des produits d’assurance une série d’obligations en lien avec la mise sur le marché de produits d’assurance. Ces obligations incombant en principe aux entreprises d’assurance en qualité de concepteurs (mais non exclusivement) sont diverses et s’articulent essentiellement autour d’un processus de validation (ou d’approbation) du produit d’assurance avant sa mise à disposition au public.
Plusieurs publications de l’EIOPA (ou AEAPP en français) ont traité de ce volet POG, exposant l’approche du régulateur Européen vis-à-vis de ce dispositif complexe en insistant sur l’importance de l’implication des organes de surveillance (AMSB) dans l’approbation et la mise en œuvre de la politique de gouvernance des produits d’assurance. Cette position européenne souligne également l’importance de la « cohérence » de ce rôle avec les autres missions de ces organes, sachant que la promotion et la diffusion d’une culture centrée sur le client constituent une part importante du processus de gouvernance des produits. La fonction conformité doit également faire preuve de la même implication dans ce processus, en produisant des rapports périodiques et des mises à jour ponctuelles en cas de problèmes significatifs affectant la commercialisation des produits d’assurance.
De surcroît, l’EIOPA préconisait l’intégration de plusieurs obligations à la charge du distributeur ainsi que des procédures de contrôle par le concepteur au sein des conventions de distribution (qu’il s’agisse de produits vie ou non vie) afin d’encadrer et surtout de matérialiser ce processus POG.
Cependant, on pouvait constater que l’application du POG sur le marché de l’assurance variait considérablement selon les acteurs et les types de produits d’assurance. En outre, certaines notions essentielles du dispositif POG n’étaient pas explicitement documentées, rendant ainsi difficile une compréhension adéquate de celui-ci. Il est donc revenu à l’ACPR de s’atteler à cette tâche, notamment à la suite de plusieurs contrôles sur place qu’elle a réalisée et révélant certaines lacunes.
Sur la notion d’« adaptation significative »
L’article 1 du Règlement susmentionné disposait que le POG devait être prévu tant pour les produits d’assurance que pour les « adaptations significatives de produits d’assurance existants » avant leur introduction sur le marché ou leur distribution aux clients sans que soit clairement définie la notion d’« adaptation significative ».
L’ACPR, après avoir rappelé les précédentes préconisations de l’AEAPP en la matière semble s’en affranchir dans une certaine mesure et précise lato sensu que cette notion englobe « les modifications apportées aux droits et obligations des clients du produit », lesquelles modifications portent sur: tout ajout, modification ou suppression d’une garantie, d’une condition de mise en jeu ou d’une exclusion de garantie, les modifications de franchises ou de plafond d’indemnité, mais encore tout ajout ou modification d’une déchéance de garantie ou toute modification tarifaire (hors indexation).
En outre, la Recommandation prend également un soin particulier à préciser son champ d’application en matière d’assurance vie en considérant que pour cette industrie, seront considérés comme une adaptation significative : les modifications apportées aux montants des frais du produit (unités de compte inclues), aux modifications tarifaires, aux amendements de la liste des supports, aux caractéristiques du mandat, des produits de risque existant (gestion libre) ou aux grilles de gestion (gestion profilée).
Sur les exigences spécifiques en matière d’assurance vie
Pour les produits d’assurance vie comportant une valeur de rachat et de transfert et investis partiellement ou totalement en unités de compte, l’ACPR détaille avec précision ce qu’il est entendu de définir comme « marché cible » qui est une notion pivot de la procédure POG.
A grands traits, l’ACPR considère que les critères suivants devraient être utilisés pour définir le marché cible pour ces produits aux caractères particulièrement sensibles : les connaissances et expérience du client ; la situation personnelle et financière ; la tolérance au risque et à la capacité à subir des pertes ; et enfin les objectifs et besoins des clients.
Sur cette base, et lorsqu’un produit d’assurance peut répondre différemment à ces critères, les assujettis sont invités à segmenter le marché cible en un nombre approprié de sous-groupes. En outre, pour ces sous-groupes, les caractéristiques d’actifs répondant aux besoins du sous-groupe de clients devraient également être pris en compte comme marqueurs déterminants.
Autres considérations en matière de POG
La Recommandation ambitionne d’être un véritable guide en matière de POG sur les différents points encadrant ce dispositif. On pourra, en guise d’illustration, souligner les points suivants.
• L’ACPR définit ses préconisations en matière d’articulation entre le marché cible et la définition de la stratégie de distribution.
Ici, le concepteur devra mettre en place un dispositif de sélection des distributeurs de ses produits en prenant en compte de critères objectifs pour s’assurer de la mise en œuvre par ces derniers de stratégies de distribution compatibles avec le marché cible du produit.
En outre, les dispositifs de contrôle interne devront inclure les bonnes pratiques proposées par l’ACPR dans sa Recommandation. Aussi, le concepteur devrait s’assurer que les distributeurs et leurs réseaux agissent conformément à la stratégie de distribution qu’il définit.
• En matière de tests produits, la Recommandation incite à démontrer que pour chaque caractéristique du produit, offre un rapport qualité-prix satisfaisant, c’est-à-dire lorsque, en comparaison à d’autres produits du marché, les frais et coûts sont proportionnés aux bénéfices pour le marché cible identifié.
• S’agissant du suivi et réexamen des produits, l’ACPR prescrit une surveillance continue et une révision périodique des produits pour détecter les événements qui pourraient avoir un impact important sur leurs caractéristiques principales, leur couverture des risques ou leurs garanties.
En outre, il convient d’examiner si les produits continuent d’être en adéquation avec les exigences, les buts et les particularités de chaque segment du marché cible identifié. Cela implique l’appréciation de la performance, en prenant en compte la période du cycle de vie à laquelle les clients cibles sont susceptibles de renouveler leur contrat.
Enfin, si, au cours de la vie d’un produit d’assurance, le concepteur venait à identifier les circonstances susceptibles d’avoir un effet négatif sur le marché cible, il devra prendre les mesures nécessaires pour atténuer la situation et empêcher que l’événement préjudiciable se reproduise.
Volet 2 – Au sujet de la rémunération et du conflit d’intérêt
Durant les discussions sur l’élaboration de la législation DDA, les questions de la rémunération et des conflits d’intérêts ont été largement débattues. Ces sujets ont suscité de nombreuses inquiétudes parmi plusieurs acteurs du marché, en particulier les distributeurs, et ont été l’objet de moult publications et réflexions plus ou moins heureuses.
A ce jour, la réglementation en France, est assez simple et se concentre autour de l’article L. 521-1 III du Code des assurances interdisant le paiement d’une rémunération à un distributeur qui reposerait sur des objectifs de vente ou sur l’encouragement – direct ou indirect – à recommander un produit d’assurance particulier qui ne correspondrait pas, in fine, aux exigences et aux besoins du souscripteur éventuel ou de l’adhérent éventuel. On soulignera que dans une version préparatoire de cette Recommandation, l’ACPR notait que cela est « d’autant plus susceptible d’intervenir lorsque les distributeurs sont en situation de proposer des produits différents mais assortis de garanties d’assurance similaires et donc substituables ».
De plus, des obligations supplémentaires sont édictées, notamment en ce qui concerne la gestion des conflits d’intérêts, aux articles L. 522-1 et suivants du code des assurances pour la distribution de produits d’assurance-vie avec valeurs de rachat et/ou de transfert et de contrats de capitalisation. Il existe en sus des exigences concernant l’encadrement des rémunérations dans la distribution de ces contrats, mentionnées à l’article 3 et à l’article 8 du règlement délégué (UE) n°2017/2359.
Sur la rémunération
A cet égard, l’ACPR souligne qu’il convient de ne pas instaurer une politique de rémunération incitative, sous quelque forme que ce soit, qui aboutirait à des situations à rebours des intérêts du preneur d’assurance (par exemple, ne pas proposer au preneur le produit présentant le meilleur rapport qualité / prix au regard des garanties proposées). En revanche, il est envisageable de mettre en œuvre une politique de rémunération encourageant la vente au respect du marché cible et de ses éventuelles segmentations.
En outre, il est recommandé d’intégrer dans les dispositifs de contrôle interne, les vérifications nécessaires pour veiller à l’adéquation des opérations de distribution aux besoins et objectifs du client.
Dans cette veine, et s’agissant des distributeurs, ces derniers ne devront pas introduire une rémunération incitative différenciant les concepteurs différents si les écarts de rémunération ne se justifient pas.
En matière d’assurance vie, les recommandations de l’ACPR sont encore plus strictes en ce que toute politique de rémunération qui prévoirait une rémunération variable uniquement fondée sur des données commerciales quantitatives ( à l’instar des volumes des ventes) ou un sur-commissionnement au titre de l’encours des seuls supports en unités de compte ou de certains d’entre eux (fonds euros, supports en unités de compte, produits structurés) ou d’opérations analogues ne correspondant pas aux besoins et exigences du client, est prohibée.
Sur les conflits d’intérêts
L’ACPR relève qu’il convient de considérer comme présentant un conflit d’intérêts la situation dans laquelle le distributeur commercialise un produit qu’il a lui-même souscrit au profit de ses clients (pour les produits d’assurance de groupe sur la vie).
Dans une telle hypothèse, le distributeur pourra corriger cette situation en s’assurant des intérêts des clients, en proposant une transformation de leur contrat et en se dotant d’un système de gouvernance adapté (à l’image de celui décrit à l’article L. 141-7 du Code des assurances).
Cette nouvelle recommandation pose indubitablement la question de sa pertinence sur le marché. Une nouvelle fois, alors que les réglementations européenne et française sont déjà lourdes pour les acteurs, qu’ils soient (co)concepteurs ou distributeurs de produits, une énième vague de règles contraignantes tend à s’imposer à eux. Une fois de plus, le débat sur la soft law émise par certaines autorités administratives interroge. Comment justifier un contrôle administratif, sur la base de règles qui peuvent aboutir à une sanction mais qui ne sont pas édictées par un législateur ? La frontière est parfois ténue entre recommandations et injonctions. Après le débat sur le pouvoir des juges, vient à poindre le débat sur le pouvoir normatif des régulateurs…
Auteurs : Luc Bigel, Avocat Associé aux Barreaux de Paris et du Québec & Hamza Akli, Avocat Counsel au Barreau de Paris, DLA Piper France LLP
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